Qu’on le veuille ou non, pendant cette longue période de cours à la maison, une part non négligeable d’adolescents HPI (et autres) n’aura pas fait grand chose… visios pendant lesquelles on peut aisément jouer de ses capacités à la double-tâche, devoirs évalués mais non notés, choix possibles des cours selon les connexions (« désolé, je passe sous un tunnel, ça ne capte plus ! »).
Certains de mes clients ont pu apprécier l’ampleur du vide. Certes ils n’ont pas travaillé (je dirais ni plus ni moins mais avec encore moins de contraintes) et en plus les adultes n’ont pas régulé cette situation : ni punition, ni reconnaissance, ni écoute réelle possible.
Une écœurante liberté leur a été donnée : écrans avec jeux et séries pendant des heures, au final, c’est comme une boulimie de sucré, c’est tout sauf satisfaisant. Un bon point donc : pouvoir jouer toute la journée, le fantasme rêvé et enfin atteint, montre ses limites.
D’autres ont laissé cours à leur créativité, ou ont confirmé que leur univers familial n’était décidément pas vivable.
Nous allons certainement coacher certaines de ces personnes bientôt, parce qu’à la rentrée prochaine elles n’iront pas très bien, et quand il faudra trouver une orientation, travailler, elles auront peut-être du mal à se positionner, à remplir ce vide de quelques mois pendant lequel il ne s’est rien passé, et cela sans que la foudre des dieux capitalistes ou communistes ne percute les traitres à l’économie et au communautarisme.
J’espère alors que ces difficultés seront fertiles, qu’entre sacrifice pour les actionnaires et sacrifice pour les idéologues il se formera une troisième voie, celle d’une réflexion profonde : au boulot pour qui ? pour quoi ? pour quelles valeurs, quelle force vitale, quelle place de l’amour, de l’homme remis à sa place dans le monde, de la connaissance ?
Une chose est souhaitable : cette année certaines et certains jeunes auront appris l’absence de contraintes sans la liberté de choisir, et c’est une belle leçon de la vie qui leur donnera plus tard l’envie fertile de comprendre mieux ce vide abyssal du face à face avec soi-même auquel nul enseignement ne les avait préparé.